Sadisme et volupté ?
Les annonces de Castex
C’est devenu un rite : une fois tous les quinze jours, les Français sont invités à se ressembler devant le petit écran pour écouter Macron ou Castex ou Salomon leur exposer le nouveau pas de danse collectif que le pouvoir leur a concocté. Tel l’ours de Pavlov, ils sont ensuite invités à lever la patte en cadence, à tourner sur eux-mêmes, à sautiller sur place, avant de s’assoir sagement, à l’heure du couvre-feu, dans la position du confiné en distanciation sociale. Ce petit jeu dure depuis neuf mois, mais force est de constater que les Français sont de plus en plus réticents, d’autant que, simultanément, ils découvrent (par exemple à l’occasion d’un rapport du Sénat) qu’on leur ment sans vergogne.Quand on subit les monologues d’Etat, comme celui de Castex jeudi soir, il est nécessaire de se désintoxiquer au plus vite. Trois minutes à peine après la contre-performance de Castex, les intervenants réunis par Pascal Praud, sur le plateau de CNews, la résumaient par ces mots : « Il y a du sadisme et de la volupté chez nos dirigeants. » Quelques millions de téléspectateurs ont sans doute eu le même sentiment, le même désir de changer de programme.
Que nous a dit en effet le premier ministre ? Que la France faisait mieux que ses voisins (oubliant de signaler que notre taux de mortalité dû au Covid nous plaçait toujours parmi les pays les plus gravement atteints). Mais qu’en dépit des améliorations, nous avions atteint un plateau inquiétant. Difficile de distiller message plus brouillé !
En pratique il n’y aura pas de vraie messe de minuitLes mesures annoncées par Castex vont globalement dans le sens d’un nouveau durcissement du confinement. Certes les attestations de sortie ne seront plus obligatoires, mais les contrôles inopinés seront renforcés. Et il n’y aura pas de cinéma ni de théâtre ni de spectacle et de fête publique trois semaines de plus que prévu, et aucune exception pour la nuit du 31 décembre. C’est la mort programmée de l’industrie du spectacle. Un couvre-feu de 20 heures à 6 heures du matin sera la règle, avec pour seule exception le soir de Noël, mais la « jauge » ne sera pas revue à la hausse pour la messe de minuit, ce qui veut dire en pratique que les églises devront rester quasiment vides. Curieusement Castex n’a pas évoqué la coutume des incendies de voitures, chaque 31 décembre, dans les zones de non-droit…
Le schéma global qui nous a été présenté est donc sinistre à souhait. Mais si le Premier ministre annonce une sévérité accrue, et la mobilisation de 100 000 policiers la nuit de Nouvel An, il n’est pas certain qu’il ait bien mesuré le degré d’énervement de ses concitoyens : l’incohérence dans les mesures (on sait par exemple que cinémas, théâtres et églises ne sont aucunement des lieux de diffusion du virus), l’impossibilité pratique de faire appliquer de telles règles par tous et partout, et l’énorme risque d’une explosion de violences, notamment la nuit du 31 décembre.
Le principe de précaution – car c’est de cela, uniquement, que l’on parle – a ses limites, qui s’appellent le bon sens, le péril économique, une nécessaire prise de risque pour continuer à rester debout. Et l’ours de Pavlov pourrait bien refuser de danser plus longtemps, voire manifester l’envie de briser ses chaînes.
Francis Bergeron pour
Présent