Un mois après le débat parlementaire sur l’immigration souhaité par Emmanuel Macron, un rapport des inspections générales des affaires sociales et des finances met l’accent sur les abus liés aux dépenses de santé pour les étrangers. Parmi les principales recommandations : mettre fin au tourisme médical.
Une refonte de l'accès aux soins des clandestins pour mieux gérer les dérives migratoires
C'est l'idée du gouvernement qui a dévoilé ce mercredi son nouveau plan sur l'immigration. Un mois après le débat parlementaire sur la question souhaité par Emmanuel Macron afin de couper l'herbe sous le pied de son principal rival, le Rassemblement National, l'exécutif a décidé de mettre l'accent sur le volet sanitaire. Pour en arriver là, le gouvernement s'est notamment appuyé sur un rapport commandé auprès de l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS. Remis quelques heures avant les annonces gouvernementales, il dénonce les nombreux abus liés notamment à l'Aide Médicale d'Etat, l'AME.
Au delà d’une simultanéité douteuse, les conclusions visent à changer ce dispositif décrit comme l’un des systèmes «les plus généreux d’Europe» puisqu’il permet à tout étranger résidant sur le sol français de manière irrégulière depuis plus de trois mois d’être soigné gratuitement.
Fin 2018, l’AME concernait «318 106 étrangers en situation irrégulière, dont la moitié vit en Île-de-France et les deux tiers viennent d’Afrique. Le tout pour un coût total de 904 millions d’euros l'année dernière, un chiffre en hausse de +1,4% par an depuis 5 ans. Un coût qui atteint presque le milliard d'euros auquel il faut ajouter les dépenses de la PUM, la protection universelle maladie, qui frise les 200 millions d'euros par an. Si les associations d'aide aux clandestins préfèrent ironiser sur la question de l'AME, son coût a néanmoins plus que doublé depuis son lancement.
Au delà de l'explosion du coût de l'AME, le rapport accrédite surtout l'idée d’une migration pour soins, qui n’est clairement pas un phénomène marginal. En guise de preuves, les auteurs du rapport s'appuient sur l'importance du recours à certains soins spécifiques liés aux accouchements, à l’insuffisance rénale chronique, aux cancers ou encore aux maladies du sang. Ainsi, pour exemple, la proportion d'individus souffrant d'infections rénales et urinaires est 30 % plus élevée que dans la population générale.
En partant de ce constat, l’IGAS a établi un objectif clair : lutter contre les abus du système et notamment ce qu'on appelle le "tourisme médical". Un point sur lequel s'accorde le gouvernement et le ministre de la Santé, Agnès Buzyn. C'est dans ce but que le premier ministre, Edouard Philippe, a annoncé l'introduction d'un délai de trois mois avant que les demandeurs d'asile puissent bénéficier de la Protection universelle maladie et d'un accord préalable de la Sécurité Sociale pour les actes non-urgents relevant de l'AME… Une manière de faire oublier que précisément des actes non-urgents sont bel et bien pris en charge par l’AME.
Si la volonté de limiter les fraudes peut s’avérer positive, le problème de l'Aide Médicale d’Etat est loin d’être réglé à l’instar de la crise migratoire. En effet, si le gouvernement fait mine de durcir le ton afin de contenter un tant soit peu l'opposition de droite, aucune décision forte pour limiter les arrivées massives de clandestins n’a été prise. Une façon de ménager la chèvre et le chou pour ne pas froisser l’aile gauche de sa majorité déjà échaudée dont une dizaine de parlementaire devrait refuser de voter les réformes. Une communication bien huilée, donc, avec, comme d’habitude, beaucoup d’effets d’annonce pour faire oublier que les choses ne sont pas prêtes de changer.