Exécrable soif de l’or (Virgile) ! Voici le retour de la « relique barbare » (Keynes), le prix de l’or flambe sur les marchés (au plus haut depuis 2013).
Nous ne faisons pas nôtre l’expression de Keynes qui voyait dans l’or une trace du passé et souhaitait qu’il fût écarté de la monnaie, lui qui voulait avant tout une cheap money, une monnaie à bon marché pour favoriser la croissance. Le paradoxe étant que, si l’or flambe, c’est en partie parce qu’on nous a fabriqué de la monnaie (BCE, FED) à bon marché et que cette monnaie de singe issue du fameux QE (politique d’assouplissement monétaire), supposée favoriser la croissance, est de la fausse monnaie. Les banquiers centraux sont en quelque sorte des faux-monnayeurs légaux. Il faut néanmoins reconnaître que l’abandon de l’étalon-or n’est pas d’aujourd’hui : commencé dans les années vingt à la suite de l’effroyable inflation de guerre, il fut poursuivi sur le plan international par l’abandon des accords de Bretton Woods (1944) et la fin de la convertibilité en or du dollar par Nixon dans les transactions internationales (1971). Mais il y avait déjà longtemps que les particuliers ne pouvaient plus obtenir de l’or en échange de la monnaie fiduciaire (le billet) : le cours forcé, dès 1914.
Ruée sur le métal jaune
Une hausse continue de l’or s’observe depuis plus de six mois. Pourquoi est-il passé du désintérêt à l’engouement en un an ? Cela traduit une réelle inquiétude des investisseurs, y compris pour les Exchange Traded Funds (ETF), l’or papier, de fait, une folie ! Signal fort : tous les grands Etats renforcent leurs stocks d’or, Russie, Chine, Inde, mais aussi la Turquie et bien d’autres pays, pour réduire leur dépendance au dollar. Mais ce sont surtout les alertes sur les dettes qui conduisent à cette politique. Chacun sait que des bulles peuvent de nouveau exploser façon subprime, mais en plus fort. Le prix Nobel Joseph Stiglitz y avait vu « le triomphe de la cupidité » ; ce vice a largement subsisté aujourd’hui. Et si la croissance se réduit comme en Europe et aux USA, le risque de défaillance sur remboursement va croître, surtout si les taux d’intérêt remontent. Bref, l’or apporté sur terre par des météorites retrouve sa fonction d’étoile… filante !
Quid des particuliers ?
Pour les petits investisseurs, cette incertitude économique se traduit par des comportements traditionnels d’épargne de précaution. D’autant que le taux du livret A se retrouve plus faible que celui de l’inflation : c’est donc un placement qui perd de la valeur.
Quelques pièces d’or peuvent faire l’affaire, tout en se souvenant d’une certaine stérilité de l’or, qui ne porte pas intérêt et dividende, mais permet de passer la tempête jusqu’à une reprise à long terme. On peut toujours acquérir des pièces si le lingot nous est interdit par nos modestes moyens.
Le Napoléon, le Krugerrand sud-africain, la Maple Leaf canadienne, l’Eagle américain. Mais vous n’irez pas avec ces pièces chez votre boulanger, pour acheter votre pain ! Je déconseille aussi le matelas comme cachette.
Olivier Pichon pour
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