Quand il s’agit de dire en quoi l’année 2020 fut une horrible année, on pense bien entendu d’abord à la crise sanitaire, à ses victimes, et aussi à l’effondrement économique qu’elle annonce, et plus globalement au déclassement de la France, qu’elle va accélérer. Mais si on se retourne sur l’année écoulée, si on feuillette la collection de
Présent, par exemple, on ne peut qu’être frappé par une suite d’évènements d’une autre nature, qui, mis en perspective, se présentent comme un bouquet de tristes nouvelles : la disparition de nombre d’amis parmi les plus fidèles, de personnalités qui ont accompagné l’histoire de
Présent, et aussi l’histoire d’une famille politique, l’histoire de nos engagements politiques, religieux. Connues ou pas, au-delà de notre « famille », ces personnalités ont marqué leur temps par leur courage d’abord, et aussi, bien entendu, par leur talent propre.
A l’appel de nos morts, je cite Jean-Baptiste Chaumeil, Jean-Pierre Dickès, Xavier Dor, Edouard Ferrand, Dom Forgeot, Jocelyne Khoueiry, Daniel Hamiche, Roger Holeindre, Jean-Marie Le Chevallier, Hervé Pinoteau, Jean Raspail, sans oublier Pierre Sidos et Denis Tillinac (qui auraient certainement détesté qu’on les cite de conserve, j’espère qu’ils ne m’en voudront ni l’un ni l’autre, de là-haut). Est-ce tous les ans comme cela ? Ou bien l’année 2020 a-t-elle été spéciale, sur ce plan aussi ?
Quand on dresse ce bilan, très sommaire, on reste pétrifié par le sentiment d’avoir perdu, à titre personnel, des êtres chers, tant ils ont été liés à notre histoire collective, avec ses moments heureux, ses chagrins, ses disputes et ses succès. Encore cette liste oublie-t-elle certainement quantité de figures de la tradition catholique et des engagements nationaux. La revue
Lectures françaises publie chaque mois la liste de nos morts, et pour l’année 2020, elle comporte bien d’autres noms.
Jean Raspail le 13 juinOui cette année – plus qu’aucune autre, dans les temps récents, semble-t-il – fut une année terrible qui a vu disparaître ces amis que nous pleurons encore. Nos prières les accompagnent.
La mort de Jean Raspail, le 13 juin, nous a tous frappés de sidération.
Présent du 16 juin lui consacra une édition spéciale, qui titrait sur « Jean Raspail au-delà des mers », et reprenait ce constat, tiré de l’article d’Alain Sanders du même jour : « L’auteur du prophétique
Camp des saints nous a quittés. Il n’aura jamais cessé de nous raconter de belles histoires pour nous consoler des laideurs du temps. » Dès juillet,
Présent publiait un hors-série sous la direction d’Aristide Leucate, qui fut un grand succès, la plus grosse vente de tous nos hors-séries à ce jour. Preuve, s’il en est, que cette impression de vide, que nous avions tous ressentie, nos lecteurs l’ont ressentie de la même façon. Nous pensions que
Valeurs actuelles, voire
Le Figaro Magazine, publieraient eux-mêmes un hors-série. Etrangement il n’en a rien été. Et nous n’avons pas anticipé cette pusillanimité.
Mais la mort de Roger Holeindre, quelques mois plus tôt (très exactement le 30 janvier), avait déjà constitué comme une alerte aux mauvais vents sur le point de s’abattre sur notre pays. Roger Holeindre – Popeye – avait été de tous les combats pour la France française. « On le croyait indestructible » comme devait le rappeler le père Argouarc’h lors de sa messe d’enterrement. Nous ignorions alors que sa disparition ne faisait qu’inaugurer la liste de nos afflictions.
Francis Bergeron pour
Présent